un état de mes reflexions sur le sport santé partie 1

4 nov. 2024

Sport pour la santé : l’état de mes réflexions

Voici deux ans que j’ai pris une disponibilité par rapport à mon métier d’ergonome et d’intervenant en santé – sécurité au travail pour me professionnaliser dans l’accompagnement d’une vingtaine de patients dirigés par deux médecins avec comme mission de les remettre en mouvement afin d’améliorer leur qualité de vie et leur autonomie.

L’occasion pour moi d’un premier bilan…mais aussi de questionnements

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Préambule : Ce que je pense savoir est dérisoire par rapport à tout ce que j’ignore …et la  solution à mes interrogations réside peut-être dans quelque chose que je ne connais pas encore

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Légitimité d’un éducateur sportif issu du monde de la compétition

La législation différencie plusieurs catégories d’intervenants dans le champ du sport -santé, chacun étant habilités à travailler avec un type de public en fonction de leurs limitations : les kinés, les intervenants APA (issus de la formation universitaire), les éducateurs sportifs ayant effectué une formation de remise à niveau dans le sport santé.

J’appartiens à cette troisième catégorie et je suis entré dans l’univers de la santé avec une grande modestie, une  méthodologie de l’entraînement acquise au cours de mes 30 années du coaching dans le haut niveau en athlétisme… mais aussi (ce qui est un trait de fonctionnement des nombreux entraineurs de compétition), la « manie « de se sentir obligé de se forger un modèle personnel de compréhension pour mieux s’approprier les concepts.

Pour nous faire confiance, les médecins ont besoin de s’assurer que nous saurons nous adapter à un public aux capacités physiques limitées (mais au potentiel de progression fantastique), au niveau d’énergie assez fluctuant et plutôt peu enclins à réaliser des efforts.

Que nous saurons détecter toute anomalie de réaction à l’effort  et être très progressifs (surtout au tout début ou tout se joue, pour bien identifier le niveau 0 du début de progression)

Mais surtout que nous apporterons au  monde de la santé des savoirs faire et des compétences en terme de résultats mesurables  (ne serait-ce que pour prouver aux institutions que l’activité physique en tant que thérapie complémentaire non médicamenteuse cela fonctionne !)

Le médecin rhumatologue avec qui je collabore aime questionner ses patients quand elle les revoit et leur demander : « qu’arrivez-vous à faire aujourd’hui qui vous était impossible ou compliqué hier ?

Les institutions et les collèges scientifiques émettent depuis les années 90 des recommandations en matière de sport santé. Mais j’ai assez rapidement constaté que ces recommandations d’efforts certes validées par des études visaient plus un état minimal de santé et encourageaient au strict minimum « syndical » pour ne pas décourager la population générale (avec la logique implacable du « 10 minutes d’activité c’est déjà mieux que de ne rien faire du tout  » )

Mais de nombreux médecins nous invitent à plus d’exigence pour viser un niveau optimal de santé et un niveau d’activité beaucoup plus en relation avec notre patrimoine génétique.

Le pr Carré le résume très bien : faire bouger les gens un peu plus c’est déjà bien mais le véritable enjeu pour les personnes que vous accompagnez est qu’ils améliorent leur capacité physique et gagnent des « mets «.  Un autre médecin et chercheur en science de la longévité, le Dr De Jaeger précise quant à lui : une activité physique de santé s’évalue à la masse musculaire gagnée (ou du moins maintenue)

Qu’est ce que doit être le sport pour la santé ?

En tant que professionnel du sport santé et partenaire de confiance des médecins prescripteurs je suis conscient de ma responsabilité. Quoi de plus précieux en effet que la santé de ces personnes qui nous font confiance et s’en remettent à nous et nous devons être sûrs de ce que nous mettons derrière le mot « sport pour la santé « 

La question de cette définition me passionne, et ce d’autant que le qualificatif « santé « accolée à toute sorte d’activité ou de produits est devenu très racoleur voire trompeur

J’ai en tête cette citation de Franck Forencich dans son « manuel pour bouger «  le mouvement nous relie à la totalité du monde animal , il est ancien et primitif … l’exercice lui est moderne et strictement humain. En matière de promotion de la santé l’exercice est facultatif mais le mouvement est absolument essentiel.

Cette affirmation (que je ne partage pas tout à fait) a le mérite de mettre en avant notre condition animale, celle qui nous relie à notre évolution et j’ai acquis une première « conviction » : Les sciences de l’évolution humaine ont beaucoup à nous apprendre pour nous aider à définir ce que doit être une activité physique préventive pour notre santé générale et respectueuse de notre nature génétique profonde.

J’ai compris que notre génétique encore très proche d’homo sapiens nous prédestine plutôt vers les qualités d’endurance de force et je me montre depuis un peu plus sceptique quant à la valeur « sport santé » d’activités trop déséquilibrée dans le mélange Force et "Cardio "

Faudrait il parler de mouvement plutôt que de sport santé ? est-ce que les disciplines millénaires comme le yoga ou le taichi ou plus récentes comme le pilates  ou encore plus récentes comme les écoles de mouvement (ido portal, animal flow, ginastica natural …) sont les seules à pouvoir revendiquer ce qualificatif ?

J’ai un infini respect pour ces activités, j’admire l’intemporalité et la puissance du yoga ainsi que  le génie de Joseph Pilates ou de Ido Portal mais je pense que si ces disciplines ont tout à fait leur place dans une pratique sport santé hebdomadaire idéale elle ne peuvent suffire à l’être humain pour être en parfaite santé.

Vincent Foulonneau , un enseignant chercheur spécialiste des marqueurs biologiques du vieillissement aime dire que pour comprendre l’intérêt du sport pour la santé il faut avoir en tête les principales causes de décès (hors morts accidentelles et suicides ) , celles-ci sont les  Tumeurs 25,5%  , (avec un doublement du nombre de décès entre 1990 et 2018) , les maladies cardiovasculaires 20,8 % , les maladies respiratoires 6,7 % et le covid 19

La science nous apprend que le marqueur le plus pertinent pour évaluer les facteurs de risque des 4 premières causes de mortalité est la consommation maximale d’oxygène qui traduit les capacités couplées de nos système cardio vasculaire , pulmonaire et mitochondrial.

Améliorer la VO2 max (ou la capacité physique exprimée en mets) est un processus aujourd’hui bien connu et maitrisé de la science de l’entrainement et nécessite un important volume d’efforts aérobiques à basse intensité (au min 4 h à 6 h par semaine qui peuvent être de la marche active) mais aussi des stimulations d’efforts cycliques à haute intensité (une fois par semaine, d’une intensité proche de Vo2 max ,  sur des efforts de 30 sec à 4 minutes et pour un volume global de travail de 8  à 12 minutes …semblant être suffisant) 

Parmi les facteurs d’une bonne Vo2 max, si le débit cardiaque a longtemps été mis en avant , le potentiel de nos mitochondries (densité et efficacité) est le facteur qui semble le plus étudié aujourd’hui et qui révèle études après études des liens de causalité très étroits avec la longévité en bonne santé (j’ai compris en particulier que la théorie des tumeurs autrefois génétique devient de plus en plus métabolique avec la santé mitochondriale au cœur)

Entrainement pour la santé ou pour limiter les effets du vieillissement pour éviter qu’il ne devienne pathologique ?

Travailler avec des patients souffrant de pathologies chroniques c’est le plus souvent accompagner des personnes dites âgées (même si, et c’est un autre grand acquis de ma nouvelle expérience , l’âge chronologique est une notion bien relative lorsque l’on parle de capacité à pratiquer une activité physique) .

Notre corps se développe pour atteindre une plénitude vers 25 – 30 ans puis subit une implacable loi de la détérioration. La jeunesse éternelle du corps est un mythe mais freiner la dynamique des marqueurs du vieillissement est quelque chose de tout à fait envisageable.

C’est là qu’intervient ma 3 eme révélation de ces deux ans : tenter de comprendre le vieillissement suppose de regarder le corps humain à l’échelon cellulaire et de s’intéresser aux 12 (pour l’instant) marqueurs du vieillissement.

La grande question devient comment distinguer un vieillissement normal et inéluctable de nos organes et de nos qualités physiques, cognitives et intellectuelles d’un vieillissement pathologique

J’ai évoqué les mitochondries et leur importance cruciale mais deux autres aspects semblent cruciaux :

-            L’entrainement de la Force neuro musculaire

-            L’entrainement de la boucle sensori motrice

Le vieillissement affecte notre masse musculaire et en particulier notre  pool de fibres musculaires rapides. Depuis 2016 la sarcopénie est officiellement reconnue comme une pathologie du vieillissement

Deux études ont particulièrement retenu mon attention cette année l’étude chilienne de Marzuca Nassr en 2003 et celle danoise de Ibenfeldt en 2024

Ces études d’une grande qualité méthodologique ont très clairement montré les enseignements suivants :

-            Les personnes âgées de 70 à 85 ans  qui ont participé à ces études ont obtenu à la fois des gains de force isométriques mais surtout des gains de masse musculaires après des programmes supervisés de musculation du corps entier de 3 mois minimum ,  à raison de 3 séances par semaine avec un niveau d’intensité de  70 – 85 % , une fourchette de répétitions de 12 à  6 reps par exercice (en fonction de l’intensité) , 5 ou 8 exercices « corps entier »selon les protocoles  et 200 répétitions durant la séance. Preuve qu’il est possible de reprendre de la masse musculaire même à des âges avancés mais que pour cela il faut s’entrainer contre des résistances … ( à  noter que l’étude de Ibenfelldt a montré des gains en force et de masse musculaire (un peu moins important , mais quantifiés …) avec un programme d’entrainement au poids du corps mais avec des fourchettes de répétitions plus grandes 15 à 20 et un volume de 400  répétitions par séances)

-            Ces gains de force et de masse musculaire ont subsisté dans le temps (environ 6 mois) après la fin des entrainements …mais le retour à la vie normale de ces personnes âgées témoins ont fini de réduire à néant ces acquis, preuve que l’activité musculaire d’une personne retraitée ordinaire est insuffisante pour entretenir la masse musculaire et que des efforts de renforcement musculaire réguliers sont nécessaires pour prévenir la sarcopénie

Aujourd'hui est le moment de prendre votre temps?

Aujourd'hui est le moment de prendre votre temps?

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